Invocation
Invocation
Mon âme, long silence où voguent, en songeant,
L'extase et le dédain, cygnes au col d'argent...
La science massive en vous bâtit son oeuvre,
Mur où la fable met ses yeux clairs de couleuvre...
O mon âme, festins, cymbales et miroirs!
O tiède chambre obscure ouverte aux Mages noirs!
A ce livre nouveau donnez votre richesse,
O face de folie, ô face de sagesse,
Que la rude vertu le pénètre en secret
Comme une odeur de thym pénètre la forêt,
Et qu'une architecture agréable, élégante,
L'adorne, quelquefois, d'une feuille d'acanthe!
O mon âme, chantez, dans ce livre imprévu,
Ce que vous concevez, ce que vous avez vu,
parlez des dieux, des pleurs; parlez des cieux, des pommes;
Et soyez au niveau de la lèvre des hommes,
Comme le verre fin ou lourd - toujours divin!...-
Où brille la saveur coutumière du vin.
Les Fresques, 1908.